I
Celestia s'éveilla doucement. Sa tête bourdonnait encore d'une violente migraine, le dernier reste d'un sort brisé. Elle haleta doucement, et longuement, le temps que la douleur s'estompe et que sa vue s'éclaircisse.
Elle discerna premièrement un caillou : un débris gris à l'aspect étrange ; puis une poussière très fine, soulevée par son souffle au sein de sa bulle d'air magique. Celestia remua curieusement la terre et plus de cette sciure voleta jusqu'à son museau, la fit renifler, et même tousser légèrement. Elle se redressa sur ses hanches avant qu'un gros atchoum ! ne la surprenne. Elle cilla quelques instants avant de mieux analyser son environnement.
Du gris... un gris infini aussi monotone que monochrome amalgamait les collines avec le reg alentour. Au-dessus, les étoiles de sa petite sœur constellaient le noir lacunaire et abyssal de l'espace ; et au milieu de son champ de vision, un astre d'un beau bleu cotonné de blanc, où se baignaient des masses vertes immenses.
Equis. Sa planète...
Les vents solaires soufflèrent au travers de sa crinière et réanimèrent ses force, l'érigeant ainsi de toute sa taille. Elle déploya puis étira ses ailes dans le plus grand effort, et avec le même élan que pour ses pattes avant, laissant se redresser sa croupe, tel un chat recouvrant de sa sieste. Ci-fait, elle prit le temps de frétiller ses ailes, d'astiquer son collier pour enlever les dernières poussières et même réajuster sa couronne avant de débuter son trot.
Celestia avança franchement, et gracieusement, alors qu'elle se laissait porter par la faible gravité qui changeait chacun de ses pas en un bond timide. Jusqu'à que ses yeux magentas repèrent une forme au loin, qui l'intriga assez pour la stopper net. Parmi les collines et les cratères se démarquait un carré : une forme bien peu naturelle. Elle aurait bien tenté la téléportation pour s'en approcher plus rapidement mais hélas, ça n'avait pas bien marché les dernières fois ; et n'avait résulté qu'en des maux de tête.
Voler non plus semblait inutile. À chaque tentative, une force mystérieuse refermait brutalement les ailes de Celestia sur ses flancs, sauf quand elle se contentait de planer avec. Elle s'était résolue du coup à marcher. Ce n'était pas si mal. Même si elle préférait voler, la gravité lunaire lui facilitait largement la marche. Elle s'y habituerait. En plus, sa santé l'en remercierait : elle mangeait bien trop de gâteaux au palais, le moindre de ses vices. Donc un peu d'exercice ne ferait pas de mal à sa croupe volumineuse. Celestia gloussa à cette pensée, à ces pas légers.
En parlant de gâteau justement, Celestia ressentit la faim. Elle s'arrêta et prit le temps de s'exposer aux rayons de son étoile qui baissait vers l'horizon. Elle canalisa un peu de l'énergie solaire pour la consommer sous forme de magie, et ainsi alimenter son propre corps.
Ce n'était pas de la vraie nourriture mais au moins elle demeurerait répue un bon moment. Celestia soupira et continua son chemin jusqu'au carré, en s'efforçant de ne pas trop penser aux sucreries.
Elle observait attentivement Equis en itérant sa marche. Elle s'interrogeait sur ce qu'il se passait, ce qu'ils faisaient là-haut. Elle crut reconnaître les formes d'Equestria sur l'un des continents. Cette face de la planète était largement avalée par sa propre ombre, donc la plupart des poneys devaient dormir ; excéptée Luna. Elle était sûrement en train de travailler à l'heure qu'il était. Et à raison ! Même en son absence, Equestria devait...
Celestia détourna son attention de sa maison et vit qu'elle s'était déjà considérablement approchée de l'énigmatique structure. Vu de loin, le carré semblait grand mais pas tant que ça en réalité. À peine plus grand que l'alicorne immaculée, pour dire vrai.
Elle s'arrêta, maintenant arrivée à destination. Ce... carré... ou quoi que ça pouvait être, était bel et bien un carré : Une grande dalle de roche extirpée de terre puis érigée telle une stèle. La couche était relativement mince, près d'un sabot d'épaisseur, et elle s'élevait à plus de trois mètres.
Dans la pierre étaient gravées des runes, et dans une langue millénaire que Celestia eut peine à reconnaître. Mais elle ne lui était pas moins lisible. Elle traduisit les inscriptions et son estomac se noua alors qu'elle lit les mots suivants :
EN CE LIEU
UN MILLÉNAIRE J'ATTENDS
POUR MON BIEN RÉCLAMER
LA NUIT RÉGNERA POUR TOUJOURS
Celestia médita quelques temps les runes... et leur contexte. Elle fit le tour de la stèle pour s'assurer qu'il n'y ait aucun détail caché, avant d'en revenir aux runes. Un rictus heureux se forma au coin de ses lèvres.
Elle écrivit quelque chose.
Maintenant qu'elle eut terminé, elle se désintéressa de la dalle. Son regard se promena au hasard vers le bas et aperçut une série d'empreintes ; pas les siennes ; immortalisée dans la cendre par l'absence de vent. Les traces de pas s'éloignaient vers l'horizon inconnu.
Poussée par la curiosité, Celestia s'engagea à les suivre.
Remerciement à Abib pour la relecture.